06 décembre 2004 > Chronique du passé

Il y a dix ans, du mistral sur Emile-Albeau

Allez Sedan.com

Au cours de son existence, le bon vieux stade Emile-Albeau en aura vu et plusieurs générations de joueurs, dirigeants et supporters ont partagé ce riche passé. Parmi ces nombreux souvenirs, il y a un match qui a marqué bien des esprits car trois joueurs furent… expulsés! Cette rencontre a eu lieu voici 10 ans, elle mettait face à face le CS Sedan-Ardennes et l’Olympique de Marseille…


Nous sommes en décembre 1994 et le CSSA mais aussi l’Olympique de…Charleville évoluent en division 2. Avant cette 23 ème journée, les Sedanais occupent le 20 ème rang -sur 22- et les Carolos se classent… quinzièmes. Le co-leader, à l’époque, avec Guingamp, n’est autre que l’Olympique de Marseille, relégué par les instances nationales.

En championnat, les Sedanais s’en reviennent d’Alès avec un petit point dans leur besace (0-0). Seule ombre au tableau, le Guinéen Diallo, une des pièces maîtresses de la défense ardennaise, récolte un carton rouge et donc il ne pourra participer au fameux choc qui se profile à l’horizon.

Pour « le » grand rendez-vous de la saison 94-95, le stade municipal change de configuration car voilà la « petite tribune » qui se trouve entourée de tribunes non couvertes, métalliques et amovibles. Côté stade Maurice-Christophe, les « populaires » sont corrigées à coups de bulldozers et, en conséquence, plusieurs niveaux de gradins faciliteront la visibilité des supporters des deux camps car le club marseillais sera soutenu par une belle colonie, personne n’en doute ! Enfin, la commission nationale de la sécurité vient vérifier que tout est « en place ». Va-t-on dépasser le record d’affluence datant de septembre 57 avec un certain Sedan-Reims, premier derby d’une longue liste, qui a attiré 17 303 spectateurs ?

Ce match Sedan-Marseille ravive les mémoires et on évoque Célestin Oliver, l’une des figures emblématiques de la légende sedanaise mais aussi René Charrier, gardien talentueux qui, avec le regretté Dominique Rustichelli et le populaire Max Fulgenzy, portèrent le maillot des deux clubs.

Le « match de l’année » sera aussi suivi par une équipe de « France 2 », comme quoi la montée dans les Ardennes du leader marseillais est sujet à curiosité voir intérêt. Albeau à « Stade 2 », c’est plutôt rarissime !…

L’annonce du match varie d’un journal à l’autre. Pour preuve, « L’Ardennais » titre « Sedan-OM : la foule des grands jours. Tenue de soirée exigée. Dans un stade rajeuni pour la circonstance, Sedan veut terminer l’année en apothéose contre le leader marseillais » ; pour « le Méridional », « OM : un plan qui tient la route ? Une victoire à Sedan conforterait sa place de leader » qui décrit « un public remarquable à Sedan. Dans ce village, le ressort du foot est puissant » (sic); « Le Provençal » titre « OM : Noël au balcon » et d’ajouter que « au bilan, Sedan ne compte que deux victoires à la maison, voilà qui à priori ne devrait pas faire trembler les Olympiens » mais aussi, toujours en page… sportive, le quotidien sudiste évoque un rappel historique soit « c’est à Sedan que Napoléon III perdit son trône en septembre 1870 »; enfin, « Nice Matin » annonce « Marseille à Sedan pour passer la trêve en tête » et présume que « les Sedanais seront très motivés ».

Dans les rangs ardennais, l’entraîneur Christian Sarramagna met en exergue « le vécu et l’expérience des hôtes » et déplore plusieurs absences outre celle de Drissa Diallo, à savoir Thierry Pelletier, Eric Lestrade et Jean-Roch Testa.

L’OM de Gérard Gili mais aussi de… Henri Stambouli, responsable des gardiens de but et de… Hamada Jambay, vient d’être éliminé de la coupe de la Ligue alors qu’en 16 èmes, Sedan qui a écarté de sa route Valence, ira chercher une qualification chez le promu rennais. Dans le camp marseillais, pour ce déplacement dans le Nord-Est de la France, le trio Libra-Wacaboué-Cascarino est aux abonnés absents.

Jeudi 8 décembre 1994 : le grand soir est arrivé. Voilà 20 ans que l’OM ne s’est pas produit à Sedan.où le mot « défaite » n’est plus conjugué depuis quatre matches. Le Marseillais Franck Bonora va-t-il jouer un mauvais tour à ses amis de la Canebière ?

Il fait un temps froid, pluvieux et venteux et, en conséquence, le terrain est gras. Comme attendu, ils sont 10.040 à s’être rendus, malgré ces conditions atmosphériques exécrables, à Emile-Albeau. Le record de 57 tient toujours !

A Sedan, Sarramagna aligne Rodolphe, Vermandel, Jacquier, Guion, Garbay, Gombert, Guéry (puis Songné), Arpinon, Hutteau, Courtet et Bonora alors que Gili (mais c’est Marc Bourrier qui, en tant qu’entraîneur, est officiellement inscrit sur la feuille de match) mise sur Barthez, Jambay, Thétis, Casoni, Marquet, Dib, Durand, De Wolf, Germain, Tembo (puis J. Cantona), Ferreri (puis Ferrer).

Les titres de la presse du lendemain ? Pour « L’Ardennais », en page une, « La belle bataille de Sedan » et, en page intérieure, « Pas de savon pour Sedan. Sedan et Marseille se sont quittés sur un score nul au terme d’une rencontre marquée par trois expulsions et qui ne stoppe pas la bonne série ardennaise » ; « L’OM courage à Sedan. Le point du courage. Réduits à neuf après avoir mené à la marque, les Olympiens ont résisté pour décrocher un nouveau match nul à l’extérieur » (« Le Provençal ») ; « L’OM tient bon à neuf. Match heurté à Sedan. Diminués par les expulsions de Durand et de Thétis, les Olympiens arrachent le match nul face à des adversaires, eux-mêmes réduits à dix » et ceci « . L’OM résiste dans la tempête. Trois expulsés (Durand, Thétis, Bonora), un temps de chien, un match extrêmement physique : l’OM rapidement en infériorité numérique, a su quand même résister dans la tempête » (le Méridional ».

Marseille mène au score sans trop tarder car Rodolphe ne peut maîtriser un ballon adressé par Durand (2e) et Sedan égalise par Bonora qui expédie un ballon sur la transversale du chevelu… Barthez et bat ce dernier en le reprenant de volée (24e). Ainsi, le score final est-il acquis au repos.

Mais quoi, trois expulsions ? Eh ! oui. C’est tout d’abord Durand qui est réprimandé deux fois de suite par M. Cheron (14e) et le carton rouge est encore brandi devant Bonora et Thétis (34e) qui se sont « sérieusement frictionnés (« L’Ardennais ») ; « çà chauffe sur le terrain, et le juge de touche en fait part à l’arbitre qui les expulse » (« Le Provençal ») ; « le carton rouge de Thétis est compensé par celui de Bonora » (« le Méridional »).

Dans les commentaires des envoyés spéciaux, on retient notamment ceux-ci : « A Sedan, ce fut indiscutablement un combat interdit aux enfants de chœur et aux esthètes; à l’OM, dans des conditions climatiques à l’extrême, il faut souffrir, se préoccuper essentiellement d’endiguer les efforts de Sedanais coriaces au possible, se jetant comme des perdus sur tous les ballons qui passent à portée (« le Méridional ») et « Au mois de décembre dans les Ardennes, on ne s’attend pas à prendre le déjeuner en terrasse mais, quel temps de chien -pluie glacée, vent tourbillonnant- et pourtant « Depé », un des leaders des supporters phocéens, s’agite torse nu sur les grilles ! En fin de rencontre, les Ardennais se libèrent totalement et multiplient les assauts » (« Le Provençal »). Dans « L’Ardennais », on lit que « l’équipe sedanaise a été à la hauteur de l’événement. Sedan n’est pas décidé à disparaître de la planète D2 et, après avoir traîné sa misère pendant de long mois, le CSSA a amorcé la pompe à oxygène et prit du coffre ».

Dans le vestiaire sedanais, on entend « je n’ai pas l’habitude de répondre aux provocations mais, là il m’a marché sur le dos » (Bonora), « satisfaction du résultat et on a vu un bon Sedan (Rouquette), « gros match, on a offert un beau visage » (Arpinon), « soirée tranquille, nous sommes en progrès » (Jacquier), « je suis satisfait. Le public a découvert une belle équipe de Sedan » (Roumy) et, dans la tribune, l’entraîneur lillois Jean Fernandez a « trouvé l’arbitre un peu nerveux… »

Malheureusement, tout aussitôt, les Sedanais ne confirment pas et ce en coupe de France, puisqu’ils sont sortis, chez eux, par Cuiseaux-Louhans (0-2). Et, cinq mois plus tard, arrive aux commandes du CSSA un certain Bruno Metsu…



Claude LAMBERT