Sedan - Monaco : le match se joua un dimanche ... il y a 40 ans

Dimanche 22 novembre 1964, par un temps ensoleillé, Sedan se produit au stade Louis II de Monaco. Ce match fait partie de la légende du CSSA autant qu'une demi finale de coupe de France 2005.
Avec notre ami Claude Lambert, revivez l'épopée de nos joueurs qui voudront, une fois de plus, réaliser l'exploit en Principauté avec une "équipe ardennaise extrêmement rapide et mobile".

Demi-finaliste victorieux au stade Louis II, le CS Sedan-Ardennes ne s’était pas imposé dans la Principauté de Monaco depuis de nombreuses saisons. C’est bien pour cela que la récente qualification ardennaise a pu être décrite comme « historique », ce qui est tout à fait justifié. Question : à quelle date précise remonte ce dernier succès ardennais ? Depuis que l’équipe sedanaise a opté pour le statut pro, elle est revenue victorieuse de Monaco à quatre reprises. Jetons un coup d’oeil dans notre rétroviseur et nous voilà lors de la saison 64-65 ! Il y a 40 ans…

L’UA Sedan-Torcy vient de conserver sa place en Nationale et le club cher aux frères Laurant est décidé à repartir sur de nouvelles bases. Concrètement, Gérard Jacob s’en va à Cannes, Bernard Roubaud est transféré à Toulon, Louis Lemasson devient entraîneur-joueur à Fougères. Côté arrivées, Daniel Bourgeois, amateur à l’AS Mulhouse et Jacques Marie -recommandé par Marcel Mouchel- du Stade Malherbe Caennais optent pour Sedan où Yves Herbet passe pro. Quant à Jacky Stamm, il revient de Grenoble où il avait été prêté et Yannick Lebert est de retour après une blessure qui l’a éloigné des terrains pendant une saison. De l’effectif sedanais, c’est Max Fulgenzy, avec ses 29 printemps, qui est l’aîné.

En début d’exercice, pour le compte de la coupe de la Ligue, Sedan est battu au… goal average par le Stade de Reims. Cela n’empêche pas Jacques Ferrand d’écrire dans « L’Equipe » un article au titre révélateur : « Sedan est bien vivant… »

N’empêche que le premier match de championnat en division 1 est synonyme de déroute pour les Sedanais : cuisante défaite à Bordeaux (1-5). Et, tout aussitôt, les jeunes sedanais deviennent « fracassants », dixit le quotidien sportif parisien, car, au stade Emile-Albeau, Strasbourg est tout simplement « atomisé » (5 à 2 !) et puis ce sera au tour des Toulousains (6-0 !). Bref, la « classe biberon » ardennaise est bien décidée à réaliser une excellente saison à l’image de « Nénette » Herbet qui est sélectionné en Equipe de France Espoirs.

Lors de la 13 ème journée, voilà que les hôtes Toulonnais se montrent accrocheurs mais ils ne peuvent empêcher les « locaux » d’être à nouveau victorieux (3-2) grâce notamment à « Dédé » Perrin, alors surnommé à cause de sa coupe de cheveux, « le Beatles », buteur n° 1 du championnat et « chouchou » du stade Albeau ! Courageux, hargneux, taigneux mais aussi… employé aux « Draperies Sedanaises », tel est l’avant centre sedanais d’alors 23 ans, véritable « baroudeur des surfaces » et électricien, comme Maryan !

Les Sedanais s’apprêtent à effectuer leur plus long voyage de la saison, à Monaco, qui n’a jamais perdu à domicile. En effet, la presse rappelle que la formation monégasque vient de signer cinq succès d’affilée à Louis II, elle qui, précise-t-on, est « incontestablement de qualité, heureux cocktail de jeunes et d’équipiers expérimentés ».

Pour ce déplacement, un seul changement est prévu : Cardoni est mis au repos par Louis Dugauguez et on reverra Yvan Roy à l’aile gauche, aux côtés de… Roger Lemerre conservé à l’avant où « pour un match à l’extérieur, sa puissance athlétique sera précieuse ».

« Périlleux déplacement et rude partie en perspective » pronostique dans « L’Equipe » Marcel Perrier qui ajoute « les jeunes titulaires ardennais ont un tel moral qu’ils croient avoir leurs chances et pour cela ils devront faire preuve de mordant. Leur vif désir de réussir une bonne performance fait que les poulains de « M’sieur Louis » ont quitté les Ardennes sans aucun complexe ».

Dans le même journal, Tony Bessy évoque les possibles absences de Novak, Pietri et Cossou récemment blessés alors que le capitaine Michel Hidalgo, touché à Angers, n’a pu, la semaine précédent le match Monaco-Sedan, reprendre l’entraînement dans des conditions satisfaisantes.

Sous le titre « Même un point satisferait Sedan », Daniel Ferrières, dans « L’Ardennais », écrit « en arrivant au dernier quart des matches aller, Monaco conserve toutes ses chances pour le titre. Ses performances à domicile sont considérées en général comme logiques : le maximum des points ! Devant une équipe solide, bien organisée mais au jeu un peu statique, les Ardennais auront pour eux la rapidité de leurs échanges et de leurs courses. Alors, pourquoi ne pas envisager un bon résultat ? Un point serait un exploit. Mais, sans vouloir mésestimer leurs adversaires, les Monégasques comptent bien ajouter un nouveau nom, celui de Sedan, à la liste de leurs victimes… »

Dimanche 22 novembre 1964, par un temps ensoleillé, Sedan se produit au stade Louis II de Monaco. Sont alignés par Louis Dugauguez Tordo, Barre, Poplin, Fulgenzy, Marie, Gasparini, Salaber, Herbet, Perrin, Lemerre, Roy et Roger Courtois a fait confiance à Hernandez, Forcherio, Artélésa, Novak, Casolari, Pietri, Robin, Fouque, Douis, Théo et Djibrill.

Le lendemain, en page »une », le quotidien régional « L’Union » titre « Pour sa première victoire à l’extérieur, coup d’éclat de Sedan : 4-0 à Monaco ! » et, en page « Sports » ceci « C’est Sedan qui a écrasé Monaco. Le tandem Perrin-Roy a asséné de rudes coups aux Monégasques ».

Pour sa part, « L’Ardennais », sur six colonnes, propose le titre suivant « Bien que jouant à 10 (Roy blessé) depuis la 53 ème minute : victoire spectaculaire. Sedan triomphe par 4 0 à Monaco ».

Enfin, « L’Equipe » titre « Sedan impose son réalisme à Monaco, sans réussite ».

Alors, ces buts ? Toujours à l’affût, Perrin se joue de la défense monégasque et met la balle hors de portée d’Hernandez (17e) ; bien lancé, Roy expédie un bolide à ras de terre sur lequel Hernandez plonge, arrête en deux fois, ne peut contrôler et voilà la balle qui lui file entre les doigts et pénètre dans la cage (37e) ; Sedan obtient un coup franc près de l’angle droit de la surface de réparation monégasque. Salaber tire, Roy reprend en force et trompe une nouvelle fois Hernandez (51e) ; enfin coup franc en faveur de Sedan que Perrin tire sans conviction. Hernandez se penche pour se saisir de la balle qui lui ricoche sur le pied et va au fond des filets monégasque (78e).

Pour « L’Ardennais », c’est indiscutable « les Sedanais ont infligé aux Monégasques une sévère défaite. Equipe de tradition, Sedan a toujours mené la vie dure à Monaco… Monaco a reçu un sévère avertissement devant une équipe sedanaise qui a amplement mérité son succès. Celui-ci aurait pu être plus large sans la blessure de Roy dans l’équipe ardennaise qui afficha jusqu’à la fin volonté, assurance et sérénité ».

Dans « L’Union », il est mentionné que « cette équipe sedanaise, au nouveau visage, est sympathique par son caractère jeune et enthousiaste, s’est imposée littéralement devant Monaco, véritable candidat au trône. La force essentielle des hommes de Dugauguez semble être une ardeur remarquable. Dans l’équipe visiteuse, félicitons tout le monde, avec tout de même une mention pour Perrin et Roy qui étalèrent tous deux un sens étonnant du but et qui surent profiter des moindres occasions laissées par les défenseurs adverses ». Et Julien Giarrizzi de poursuivre « Perrin fut incontestablement la révélation de cette rencontre. Peut-être manque-t-il quelque peu de gabarit, mais il a prouvé que la finesse de jeu pouvait souvent primer la force ».

Tony Bessy, dans « L’Equipe », écrit “l’équipe ardennaise, extrêmement rapide et mobile, avec des joueurs se regroupant toujours à bon escient et attaquant avec beaucoup d’énergie et de volonté, a réussi à imposer son réalisme devant une équipe monégasque qui, en vérité, a depuis longtemps encaissé un tel carton. Les Ardennais produisirent un jeu de qualité sur le plan collectif et attaquèrent toujours même lorsqu’ils menaient largement à la marque. En face, ce fut une défaillance collective comme on en voit rarement… »

Dans « France Football », ce même correspondant, sous le titre « Perrin et Roy déchaînés » note que « après avoir obtenu une sensationnelle victoire, c’était l’euphorie dans le vestiaire ardennais. Les jeunes Sedanais se battirent avec un courage exemplaire au moment où Roy, blessé à la cheville, dût quitter la pelouse sur une civière… »

D’ailleurs, Louis Dugauguez déclarait « nous sommes contents, surtout d’avoir livré un bon match encore plus que les deux points que nous ramenons. C’est surtout cela qui m’a satisfait de la part des jeunes de l’équipe. Ceux-ci ont étalé certaines qualités techniques qui laissent présager un avenir serein ».

Et Lucien Laurant de rappeler « le travail inlassable de Dugauguez, la cheville ouvrière du club, une attention de tous les instants pour déceler ce qui ne va pas tant au point de vue moral qu’au point de vue physique ou ce qui pourrait être amélioré ».

Au vestiaire, les dirigeants locaux lançaient à l’attention des Monégasques « que cette partie vous serve de leçon ! ». Hernandez, le gardien, écoutait, la tête dans une serviette, en pleurs…

L’UAST victorieuse à Monaco par 4 à 0 ! Ce brillant résultat était parvenu à la centaine de spectateurs du stade Emile-Albeau qui assistait en ce dimanche après-midi à un match de Division d’Honneur. Les transistors avaient donné la bonne nouvelle alors que la bande à Kuzmir l’emportait de son côté par 6 à 0 ! Encore mieux que les pros…







Claude LAMBERT

Note:


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