Février 1979, il y a 25 ans ...
Cest bien connu : en Coupe de France, celui qui a la cote, cest toujours
« le ptit » ! En la matière, léquipe sedanaise a souvent joué ce rôle-là. Il y a eu bien sûr la période des années cinquante et ce avant lère du professionnalisme. Mais aussi toute cette « traversée du désert » lorsque le onze ardennais est retombé en D 3. A lépoque, joueurs, entraîneurs et dirigeants ont eu beaucoup de mérite à maintenir le navire à flot
On a même vu le CS Sedan-Ardennes réaliser un remarquable parcours en Coupe de France et malheureusement chuter face un « ogre » de lélite française. Cétait en février 1979. Il y a 25 ans
Mai 1973, Sedan quitte la D 1 et, deux ans plus tard, adieu la D 2 ! Il est évoqué une éventuelle collaboration avec
le Stade de Reims que rejoint Alain Polaniok. Au sein de leffectif ardennais, cest le grand « nettoyage » : Santos Brown, Raulin, Danty, Saurfeld, Le Bihan, Pensabène, Faytre, P. Zamojski, Simon, Bassier et « Dédé » Perrin sen vont aussi. Pierre Tordo fera avec
Celui-ci promet de tout faire pour que le club demeure à un bon niveau. Cest lépoque du « Président Nix » et les moyens financiers ne sont pas conséquents
Quant aux installations, elles sont déjà vétustes !
Juillet 1978 : reprise de lentraînement sous la houlette de
« Kiki » Perrin. On parle dun intérim et déjà les noms de Jacky Le Bihan (Rethel), Yves Herbet (Martigues), Gérard Tonnel (Rennes) et Yvan Roy (Valence) sont évoqués. Tous danciens joueurs ayant porté le maillot sedanais. Finalement, cest Yvan Roy qui est choisi, Christian Perrin devenant directeur sportif.
Au rayon des départs, il est enregistré ceux de Patrice Polaniok (Reims aussi !), Corniquet, Larue, Delcampe, Haution, Peignois, Bertolutti, Marczack et Pedrotti.
Alors, le CSSA est-il décimé ? Il entame sa préparation par un 10 à 0 aux dépens de
Rocroi ! Verdun puis Blagny et lEntente de Charleville tomberont aussi
De bonne augure ?
Juste avant les trois coups, les « vieux » supporters, toujours fidèles à Emile-Albeau, apprennent la mort, chez M. Toussaint à Givonne, de « Dora », mascotte d « Allez Sedan » lors de la finale Sedan-Rennes de mai 65. Et dire que « Dudule » (Sedan-Troyes en 56) et « Cora » (Sedan-Nîmes en 61) nous ont déjà quittés
Début septembre, Yvan Roy prend officiellement ses fonctions. Alors international junior, il est arrivé en juillet 62 à Sedan sur recommandation de Marcel Mouchel. Ensuite, il est allé à Angers, Strasbourg, Sochaux et enfin à Valence. Il revient dans les Ardennes avec un contrat de quatre années en poche, un statut de joueur-entraîneur et une licence damateur.
La saison commence mal car Jany Zanelli se blesse grièvement au travail. Heureusement, Richard Baré est qualifié et donc il intègre leffectif sedanais.
Place à la Coupe de France et le CSSA écarte successivement de sa route Tinqueux, Linay, Joinville et Troyes si bien que le voilà qualifié pour les 32 èmes de finale !
Après lexploit réalisé devant les Troyens -grâce à Harold Buffet- le quotidien sportif « LEquipe » titre « Revoici les Ardents Ardennais ! » Ainsi donc, classé modestement au 10 ème rang, Sedan a-t- il loccasion de faire reparler de lui.
Le Conseil Général nest vraiment pas sensible à ce parcours puisquil refuse de voter une subvention en faveur dun CSSA qui, en championnat, est tenu en échec par Saint-Omer, et ce au stade Emile-Albeau, devant 1.014 spectateurs !
Les Sedanais sont véritablement sous pression depuis leur victoire de Troyes et, surtout, dès que le sort leur a désigné Strasbourg comme adversaire. Limpatience semble lemporter sur la crainte
Même chez Roy qui va retrouver Dropsy, Specht, Gemmerich, Wagner, Elacher, Duguépéroux, Tanter et Gress qui furent partenaires lors de son passage en Alsace.
Il ny a pas que la curiosité et les Ardennais rêvent de donner une réplique valable à des Alsaciens brillants leaders du championnat de 1 ère division.
A lentraînement, le coach apostrophe Jean-Pierre Curé en ces termes « tu ne sais pas ce que tu vas louper
» Il est vrai que le Sedanais vient décoper quatre matches de suspension suite à un geste dénervement à Saint-Quentin.
Poursuivant leur préparation, les Sedanais affrontent chez eux, en amical, Libramont et ce sont les Belges qui sortent victorieux
Pendant ce temps-là, « Allez Sedan » prépare le déplacement de Thionville et il convient de réserver ses places. Les bus sarrêteront à Lucquy, Rethel, Attigny, Vouziers, Le Chesne, Monthermé, Bogny-sur-Meuse, Nouzonville, Neufmanil, Vrigne-aux-Bois, Charleville, Sedan, Douzy, Mouzon et Carignan. A cette occasion, il est proposé une édition spéciale du bulletin « Vert et Rouge » mais aussi un concours de pronostics, le vainqueur allant à la
finale le Coupe de France ! Pour à nouveau encourager les Sedanais ?
Le libéro ardennais Joël Trassart est militaire à Commercy et en sa qualité de pilote de char, il a été réquisitionné pour embarquer son engin dimanche sur le coup de midi à bord dun train en vue de prochaines manuvres. Et ce trente-deuxième de finale a lieu ce même dimanche à 14 h 30. Les dirigeants sedanais multiplient les démarches. « Ce ne serait pas de gaieté de cur que je me priverais des services de Joël » avoue Roy.
A Strasbourg, on se rappelle que Gérald Zamojski et Maurice Hardouin quittèrent les bords de Meuse pour lAlsace. On met aussi en exergue le fait que Michel Hidalgo vient dappeler plusieurs strasbourgeois en Equipe de France. Enfin, Jouve est suspendu mais leffectif est riche
« Les marcassins que nous sommes peuvent redevenir des sangliers ! » claironne « Kiki » Perrin dans « LArdennais ». La presse locale ajoutant « toutes les Ardennes sportives le souhaitent ».
En « une », « LArdennais » titre « Contre Strasbourg en Coupe, Sedan tente limpossible » et, en page « Sports », ceci « Sedan sans complexe face à Strasbourg ». Dans son article, Dominique Maingé précise que « les autorités militaires ont refusé à Joël Trassart la permission qui lui aurait permis dêtre aligné. Cest Jean-Pierre Cousin qui le suppléera. Allez, tous au Stade Omnisports de Thionville à défaut dAuguste-Delaune puisque la commission des terrains na pas accédé à la demande ardennaise ».
On se souvient que jadis, au même stade de la compétition, Sedan-le-cendrillon a étrillé, à Besançon, « le grand Nice » (4-1) et on évoque en ces termes les atouts du onze ardennais : « un gardien en grande forme, un milieu qui devrait parvenir à brouiller les cartes, une attaque qui devra forcer le solide rideau défensif adverse ».
La parole est donnée à « Mimile », tenancier du débit de boissons « A lHabitude », supporter de longue date, qui senflamme : « en Coupe, il existe toujours un petit espoir surtout quand on sappelle Sedan et que lon jouit du glorieux passé que lon sait ».
Dans « LUnion », on nhésite pas à évoquer ce Sedan-Strasbourg en ces termes « une bonne affaire pour les dirigeants et une récompense pour les joueurs de Roy ». Michel Quentin laffirme dans ces mêmes colonnes : « Les Ardennais sont prêts pour limpossible exploit ». « Le jour de gloire est arrivé, écrit-il, pour « la bande à Roy » qui quittera la cité de Turenne le dimanche à 8 heures du matin !Veillée darmes et mise au vert : les temps sont révolus
La Coupe conserve parfois des secrets insoupçonnés et Strasbourg, le mastodonte, le tout-puissant, la terreur sera-t-il toujours à laise face à Sedan, le faux-timide, le quelconque, le quidam ? »
Dans « LEquipe », Daniel Ferrières, sous le titre « Sortir en beauté », se demande « à quelle sauce le loup alsacien va-t-il accommoder les marcassins ardennais ? Mais, la jeune formation sedanaise est bien décidée à se battre de tout son cur et elle aura besoin des encouragements de ses supporters ».
Et, toujours dans « LEquipe », Freddy Koenig se demande si « la présence effective de Roy sera-t-elle suffisante pour damer le pion à son rival du jour, Gilbert Gress, ancien partenaire devenu entraîneur ? »
A cause du verglas, la délégation sedanaise arrive à Thionville en fin de matinée. Dans le car, Jany Zanelli qui, récemment sorti de lhôpital de Garches, na pas voulu manquer le déplacement.
Avec 4.977 entrées payantes, le record du nombre de spectateurs est battu au stade de Thionville ! Et, pourtant, il fait un temps froid et pluvieux.
Avant léchauffement, Yvan Roy converse avec les dirigeants strasbourgeois et Gilbert Gress.
A loccasion de cette rencontre, André Borkowski, le père de Nicolas, a repris du service comme masseur aux côtés de René Aimont.
Le public est tout acquis à la cause des Sedanais devenus les « locaux » comme lindique dailleurs le panneau daffichage. Et, pour saper le moral des Strasbourgeois, les supporters ardennais scandent « Saint-Etienne champion de France
»
A Thionville, on retrouve dun côté Luczkow, Schneider (puis Cousin), Jean-Pierre et Patrick Zanelli, Raux, Jean-Guy et Jean-Lou Lefebvre, Roy (puis Carbonnel), Baré, Compère, Harold Buffet et de lautre Dropsy, Marx (puis Duguépéroux), Specht, Novi, Erlacher, Deutschmann, Piasecki, Wagner, Toko (puis Tanter), Gemmerich et Domenech.
Amené à Thionville, le sanglier mascotte effectue, avant la rencontre, un tour de terrain. Question : fera-t-il le tour dhonneur comme ses prédécesseurs ? Une certitude : à lapplaudimètre, lors de la présentation des deux équipes, les joueurs sedanais battent nettement leurs adversaires alsaciens, même les internationaux !
Dans son édition du lundi 12 février 1979, « LArdennais » titre, photo à lappui, « Yvan Roy montre lexemple » et écrit « Sedan est tombé en Coupe de France mais les Ardennais furent absolument remarquables durant plus dune heure, luttant pied à pied avec les Alsaciens. Ceux-ci durent attendre les vingt dernières minutes pour assurer leur qualification. De plus, les Sedanais démarrèrent tambour battant et sans complexe. A limage de leur entraîneur Yvan Roy qui, dès la cinquième minute, expédia le ballon sur la barre de Dropsy, malgré lopposition de Domenech.
En page « Sports », Dominique Maingé, lenvoyé spécial de « LArdennais », sinterroge « que ce se serait-il passé si le tir soudain de Roy avait pris le chemin de la lucarne plutôt que de rebondir sur langle de la cage du gardien alsacien ? Il est évidemment difficile de le dire mais il est certain que pour quelques centimètres, Sedan pouvait aborder de manière différente le problème posé par Strasbourg. Et surtout, les Ardennais auraient au moins réussi ce but qui sauvait lhonneur
»
Plus loin, on lit : « côté sedanais, Luczkow a été lauteur de plusieurs interventions de classe, Raux a commandé avec autorité la défense et, en milieu de terrain, le trio Roy-J.-L Lefebvre-P. Zanelli abattit un travail écrasant ».
Les buts ? Piasecki tente sa chance, le tir contré profite à Toko qui ouvre la marque avec la complicité du montant gauche (12e) ; Piasecki donne dans le trou à Deutschmann, en position dailier droit, et le tir croisé du demi strasbourgeois fait mouche (73e) ; Tanter séchappe à nouveau et le centre de lailier alsacien ne peut être exploité par Gemmrich, mais Piasecki hérite du ballon et alourdit la marque (75e).
Ultime coup de sifflet et M. Meeus, larbitre de la rencontre, se baisse précipitamment pour le récupérer.
Dans « LUnion », sous le titre « Sedan a crânement tenu pendant plus dune heure », Michel Quentin affirme que « les Sedanais ont quitté le stade de Thionville la tête haute car, comme leurs aînés, ils nont pas manqué à la tradition car tous furent exacts au rendez-vous
A lentame du dernier quart dheure de jeu, on pensait bien que les Sedanais iraient à la prolongation tant leurs efforts étaient élaborés, leur culot légendaire et leur enthousiasme révélateur ».
Pour « LEquipe », cest « Sedan besogneux », André Lemay écrivant « Sedan, avec ses qualités de toujours, fut un challenger plus valable, jouant crânement le jeu. Sedan, se battant sur toutes les balles, tint la dragée haute au leader de la division 1. Strasbourg, au petit trot, a donc passé ce premier cap ».
Dans les vestiaires, lentraîneur-joueur Yvan Roy reconnaît « les gars ont fait le match que lon attendait deux. Pour ma part, jétais confiant en leurs ressources physiques et morales. Le score est trop sévère, nous avons encaissé un but de trop ». Gilbert Gress déclare « Roy, mon ancien co-équipier strasbourgeois, voulait tomber avec les honneurs et il y est parvenu. Son équipe a joué de manière remarquable et comment expliquer quune formation aussi dynamique et ayant de telles possibilités ne soit que dixième de son championnat ? »
Bien que la victoire ne leur ait pas souri, les équipiers de Patrick Raux ont cependant droit au champagne
bien mérité !
Claude LAMBERT
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