Il y a 37 ans...
De tout temps, le club de Sedan a fait les « yeux doux » à la coupe de France qui, parfois, lui a bien rendu. Notamment en 56 et 61
Mais, la formation ardennaise a aussi connu de sacrées désillusions. Lamertume est surtout grande lorsque lélimination intervient dès lentrée en lice, à plus forte raison lorsque ladversaire provient dune division inférieure.
Nous sommes le mercredi 24 janvier 1968 : le onze fanion sedanais tombe lors du premier tour. Il y a 37 ans
Le tirage des 32 èmes de finale en a décidé ainsi : les hommes de Louis Dugauguez se mesureront au grand
Saint-Étienne qui, après 20 journées de championnat, est leader de la D 1 alors que les Sedanais se classent 6 èmes à dix points des Foréziens.
Le match a été fixé au stade Auguste-Delaune de Reims. Joueurs et entraîneur sedanais élisent domicile à Mont-Saint-Pierre, dans lAisne. Là-bas, ils effectuent footing et exercices sur le terrain du SC Château-Thierry recouvert dune mince couche de neige poudreuse qui ne nuit en rien aux ébats des joueurs.
Herbet et Di Salvio, tous deux militaires, sont en retard au stage car, avec léquipe de lArmée, ils doivent partir en Espagne disputer un challenge. « Msieur Louis » -aussi sélectionneur national- hésite sur la désignation du douzième homme : Le Bihan ou Sillou ?
Les Sedanais « lauréats 1967 » pour le club et les joueurs » de « France Football »- peaufinent leur préparation dans le parc de lhôtel qui est déblayé de sa couche de neige. Le trio Jean-Claude Pécheux-Henri Nicolas-Pierre Vautelet prodigue des soins attentifs aux joueurs pour effacer les traces de la récente empoignade devant Rouen. Les Normands sont battus à Emile-Albeau, Salem ayant réalisé le doublé.
Bigre ! Quel solide appétit chez les joueurs dès quil est lheure de se mettre à table
Ceux-ci ont aussi une pensée pour les voisins Mouzonnais, toujours en lice, qui tenteront lexploit à Laval.
Pendant ce temps-là, munis de râteaux, de pelles et de brouettes, une quarantaine de soldats viennent épauler les ouvriers municipaux rémois attelés à déneiger le stade Delaune. La troupe est la bienvenue ! Tout ne peut être prêt alors que des congères de neige se forment à côté des gradins de la tribune Méano et des virages.
La pelouse rémoise étant recouverte dun verglas, larbitre M. Barde, la juge dangereuse et la rencontre est annulée. Lannonce ayant été faite en gare de Charleville, de nombreux supporters sedanais neffectuent pas le déplacement.
Avant la « seconde manche », le docteur Pierrot, Président du club des supporters « Allez Sedan », est optimiste : « on y croit dautant plus que la qualification se jouera sur un seul match et que Dugauguez est un orfèvre en la matière lorsquil sagit de pousser au maximum la préparation de ses joueurs. »
Les Foréziens vont-ils évoluer dans une ambiance défavorable ? « Non car Albert Batteux, leur entraîneur, a gardé de nombreuses amitiés à Reims » et Roger Pierrot dajouter « on sera suffisamment nombreux pour donner la réplique ! »
Quant à Lucien Laurant qui préside aux destinées du R.C.P. Sedan, il est catégorique : « nous gagnerons parce que cest la Coupe à qui nous devons notre réputation. De plus, Saint-Etienne -qui aurait préféré jouer au Parc des Princes, à Paris- a toujours éprouvé quelques difficultés devant Sedan et, enfin, nous évoluerons au stade Auguste-Delaune où nous avons toujours fourni de bonnes prestations devant des supporters qui viendront nous encourager en masse
»
« Allez Sedan » a organisé un concours de pronostics et, quelle que soit léquipe alignée, les « verts et rouges » sont donnés favoris ! Lavis de M. Laurant ? « Ce sera 3-1 pour nous ! » Les cartes-réponses sont à remettre dans des urnes proches de magasins. Quant à Mme Couderc, responsable de la location, elle est tout simplement débordée.
Daprès « LEquipe », les Stéphanois ont, avant le coup denvoi, «un handicap psychologique dune cinglante défaite subie à Sedan : 5 à 2 » et, on lit ceci « Saint-Étienne favori logique ; oui, mais
» Le titre, en une, est évocateur: « Saint-Etienne-Sedan, à Reims, match de coupe « au sommet ». Dugauguez présente son « équipe tourbillon » alors que la grande foule est attendue ».
Le titre de « LArdennais » est explicite « La raison dit Saint-Étienne mais le cur bat pour Sedan. Un 32 ème qui vaut une finale. Ardennes tiens ferme et
bonne chance !» Larticle qui suit évoque « laffaire Mekloufi » et « Sedan, la bête noire des Foréziens » mais aussi rappelle quen 1956, avant de se retrouver en finale, le club ardennais a éliminé Saint-Étienne en quart de finale.
Le quotidien « LUnion » nest pas en reste avec « le football collectif de Saint-Étienne (privé de Mekhloufi et dHerbin grippés) soumis aux vifs assauts du jeu enthousiaste du R.C.P.Sedan ».
Cette fois-ci, les Sedanais se sont rendus à Frahan, en Belgique, pour terminer leur préparation. Dans « LEquipe », Marcel Perrier évoque « la vallée de la Semoy, bordée de hautes collines plantées de sapins, lieu idéal de repos ».et, dans le même journal, Marcel Lardennois se demande si « les chaises de piste seront utilisées ».
Dans le camp ardennais, on est catégorique : « nous jouerons sur terrain adverse ! En effet, le public rémois sera pour Saint-Étienne, car nous sommes ladversaire régional de toujours
»
Les Sedanais savent d'ors et déjà quen cas de qualification, le prochain adversaire sera Malakoff, équipe à affronter à Saint-Ouen.
Le lendemain du match, « LArdennais » titre, en première page, «Sedan battu 2-1 mais non défait » et, en page intérieure, « la chance était du côté de Saint-Étienne, Sedan aurait cent fois mérité de jouer un second match ».
« LUnion » titre « devant 16 000 spectateurs enthousiastes, Sedan, magnifique après le repos, na pu vaincre ».
Pour « LEquipe » -et ses quatre envoyés spéciaux !- , en une, « Saint-Étienne réagit et « efface » Sedan. Le métier stéphanois a prévalu sur lardeur sedanaise ». Mais aussi « Bosquier et Fefeu signent la victoire de Saint-Étienne sur Sedan à lissue dun match exemplaire ».
Cette fois-ci, cest M. Machin qui tient le sifflet. Louis Dugauguez aligne Rose, Barre (puis Sillou), Broissard, Lemerre, Rastoll, Herbet, Bourgeois, Levavasseur, Salem, Cardoni, Di Salvio et Albert Batteux a fait confiance à Carnus, Durkovic, Mitoraj, Bosquier, Polny, Jacquet, Larqué, Fefeu, Keita, Revelli, Bereta (puis NDoumbé).
Alors que la piste est recouverte dun mince tapis blanc car la neige est à nouveau tombée en petites rafales, le match débute sur un rythme endiablé. Les Ardennais ouvrent le score grâce à Di Salvio qui reprend « magnifiquement » un centre de Levavasseur (27e). Menés à la marque, les Stéphanois se ruent à lattaque et ils égalisent sur un coup de pied arrêté, Bosquier adressant un bolide à ras de terre qui surprend Rose (31e). Tout est à refaire
Sedan va devoir courir après le score car, sur un centre de Bereta, Rose repousse le ballon du poing mais Fefeu, en embuscade, ne laisse pas échapper cette occasion et marque de près(47e). Les Sedanais accusent le coup
Le stade continue dencourager les Ardennais mais il manque aux actions sedanaises le petit coup de pouce pour conclure. Broissard surveille Keita : un duel acharné
Les dernières minutes sont pénibles pour les Sedanais -dont Lemerre, Herbet et Salem en tête de file- qui subissent un nouveau coup du sort avec la blessure de Barré remplacé rapidement par Sillou. Mais, les jeux sont faits et la belle aventure ne continuera pas pour Sedan
Contrairement aux Mouzonnais !
Pour « LEquipe », on évoque « un grand spectacle dur, impitoyable, rapide et un fantastique ballet entre Sedanais et Stéphanois ».
Aux vestiaires, on peut entendre « que de travail mais, hélas, en pure perte » (Lucien Laurant) ; « véritablement, pour moi qui ai vu de merveilleux matches avec le Stade de Reims, jai rajeuni de quelques années
» (Henri Germain) ; « nous avons joué avec plus dengagement que Saint-Étienne mais la « baraka » nétait pas avec nous. Et puis, larbitre a écourté le match de près de cinq minutes, si lon décompte les arrêts de jeu » (Louis Dugauguez) ; « nous avons perdus, certes, mais je crois que le grand vainqueur ça a été en définitive le football » (Maurice Laurant) ; « ces Sedanais ont du sang et ils nous ont mis souvent dans des situations difficiles » (Bosquier) et, enfin, pour Raymond Kopa, présent au match, « la meilleure équipe a gagné
»
Par quelques degrés en dessous de zéro, les supporters ardennais 3 000 !- embarqués par train spécial, autocars et voitures particulières, munis de bannières, clairons, crécelles, trompettes et pétards y avaient cru, eux aussi, jusquau bout
Leurs favoris avaient, à Delaune, entrouvert rapidement la qualification et souhaitaient en rester là car ils étaient pressés, leur autorail devant les ramener à Sedan vers 23 h 30
Claude LAMBERT
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