Sedan - Grenoble en coupe... Il y a 49 ans...

Ainsi donc, le tirage au sort des quarts de finale de la coupe de France effectué par Gérard Houiller a désigné le club de Grenoble comme adversaire du CS Sedan-Ardennes. Les chances des hommes de Serge Romano sont réelles d’autant plus que le match a lieu au stade Louis-Dugauguez. Déjà adversaires en championnat, Sedan et Grenoble se sont-ils déjà affrontés en coupe ? Réponse… oui ! La dernière fois, c’était en mars 56. Il y a 49 ans… Alors que l’UAST a encore le statut amateur, les Grenoblois se sont dressés devant elle. C’est en mars 53. Et, en toute logique, à Dijon, pour les 16 èmes de finale, le onze ardennais tombe avec les honneurs (0-5) après avoir déjà disputé un match devant ce même adversaire, toujours sur terrain neutre, à Besançon cette fois-ci (0-0). Il faut attendre quelques saisons avant de retrouver une semblable affiche…

Nous voilà à l’aube de l’exercice 55-56 et les dirigeants de l’UA Sedan-Torcy ne cassent pas leur tirelire question transferts. En effet, les frères Laurant enrôlent les amateurs Albert, Lemasson, Synakowski ainsi que l’avant-centre Cannois Tillon et ils perdent Zimmermann de même que le trio Sereck-Czekaj-Martin qui fut de la première heure avec « M’sieur Louis ».

Pour leurs premiers pas en Division Nationale, les Sedanais -dont les militaires Max Fulgenzy et Christian Oliver retenus en équipe nationale- ne se débrouillent pas trop mal. Ayant l’esprit libéré, ils espèrent réaliser un joli parcours en coupe de France…

Avec son nouveau statut d’équipe faisant partie de l’élite, Sedan est lancé dans la grande aventure dès les 32 èmes de finale. A Lens, c’est Bruay qui s’incline devant les « ardents Ardennais » (2-0) puis, au tour suivant, à Longwy, Epinal chute lourdement (5-1). Ces résultats sont vraiment probants et de bon augure. Et, en conséquence, le tirage suivant est attendu dans la fièvre.

Les Ardennais doivent se montrer patients pour connaître leur prochain adversaire car Rennais et Grenoblois sont obligés de s’affronter à trois reprises pour se départager et, en définitive, à Montpellier, les Dauphinois l’emportent par 2 à 0. Ainsi donc, Marseille-Nancy et Nîmes-Troyes seront les seuls chocs entre équipes de division 1 et Sedan rencontrera Grenoble à Strasbourg.

Décidément, les conditions climatiques jouent un bien mauvais tour aux équipes de football de l’hexagone si bien que les venues successives de Lille puis Lens à Emile-Albeau sont reportées et on ne sait quand aura lieu une mise à jour du calendrier.

Avant de se rendre en Alsace, Sedanais et Grenoblois apprennent qu’en coupe de France, une nouvelle formule « aller-retour »’ est envisagée. Mais, pour l’instant, seule leur confrontation du dimanche 4 mars 56 les préoccupe…

Tant à Sedan qu’à Grenoble, il existe une particularité commune : le semi-professionnalisme y est instauré puisque chaque joueur y a un « métier accessoire ». Et, cette saison expérimentale semble connaître la réussite chez des Grenoblois qui, après avoir failli abandonner en cours de saison, sont repartis sur des nouvelles bases et ce en seconde division.

Avant la rencontre, Louis Dugauguez connaît un sérieux pépin avec le forfait d’Alex Rozak qui souffre toujours du genou. Une opération du ménisque est même envisagée durant l’inter saison à venir. En conséquence, il est fait appel au portier amateur Pierre Vincent qui a déjà gardé la cage sedanaise contre Bruay et Epinal.

Enfin, Camberlain et Walter ont été écartés au sein d’une équipe ardennaise pour qui l’arrêt momentané du championnat est susceptible de se révéler salutaire. Deux parties amicales face à Boulogne-sur-Mer et Nantes ont permis de conserver le rythme de la compétition. Côté sedanais, des forces nouvelles et un punch retrouvé en attaque ajouté à la perspective de disputer un quart de finale vont assurément constituer un précieux stimulant.

« Sedan doit vaincre Grenoble » titre « L’Ardennais » qui informe ses lecteurs que le District des Ardennes de football a remis toutes les rencontres.

« A Sedan, on pense plus à une finale de coupe qu’à une première place en championnat » affirme le journal qui rappelle « qu’en seconde division les Ardennais ont toujours pris le meilleur sur les Grenoblois. » En conclusion, il est mentionné « le onze de Dugauguez causerait une vive déception s’il ne parvenait pas à assurer sa qualification. »

Dans « L’Union » sous le titre « Veillées d’armes pour des Sedanais… favoris », on peut lire « Sedan, équipe de coupe, devrait l’emporter mais, il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Avec sa ligne offensive formée de « gagneurs », Sedan dont les joueurs ont tous un moral du tonnerre, est bien armé pour vaincre et donc continuer sa route…

La troupe ardennaise se rend à Strasbourg le samedi où elle arrive dans la soirée après un changement de train à Metz. Donc, ce déplacement ne comporte pas de séjour préalable dans la cité des… cigognes.

La « une » de « L’Ardennais » du lundi 5 mars 1956 est barrée, sur huit colonnes, de la sorte : « Avalanche de buts à Strasbourg où Sedan se qualifie aisément aux dépens de Grenoble sur le score de 7 à 3. »

En page « Sports », sous le titre « L’attaque sedanaise (très en verve) submerge la meilleure défense de seconde division. Et les Ardennais s’assurent sur Grenoble une brillante qualification », il est précisé que c’est… « par téléphone » que Robert Sainmont, l’envoyé spécial de « L’Ardennais », propose un compte rendu et des commentaires titrés « Sedan fut très à l’aise ». On lit « il aurait pu y avoir une douzaine de buts, aucun spectateur n’aurait protesté tant était flagrante la supériorité sedanaise. Dans tous les domaines… Les Ardennais se montraient plus rapides, plus habiles dans le démarquage et dans le jeu de tête, plus directs et surtout plus dangereux dans les offensives et meilleurs réalisateurs. A la Meinau, nous avons assisté plutôt à un bon match au cours duquel un onze professionnel s’est littéralement joué d’une équipe d’amateurs. »

Les « héros du jour » se nomment Vincent, Daniel Carpentier, Eloy, Fulgenzy, Pascal, Chistian et Célestin Oliver, Lefebvre, Breny, Tillon et Cuenca alors qu’en face, Georges Dupraz a fait confiance à Rouxel, Venturi, Blazyck, Solomonidès, Piatek, Matthey, Bocchi,Paccina, Mendez, Gonzales et Carrier.

Compte tenu du temps pluvieux, le terrain gras nécessite la suppression de match d’ouverture. A l’appel de M.Zuszek, le trésorier de la Meinau comptabilise 5.123 spectateurs.

Sitôt le coup d’envoi donné, Grenoble ouvre le score grâce à un poteau… rentrant de Bocchi ! Les Sedanais ne semblent nullement décontenancés par ce fait de surprise alors que les supporters grenoblois se font entendre au moyen de clairons et crécelles. Ceci a probablement le don d’émoustiller des Sedanais qui égalisent, Breny feintant son adversaire direct et marquant dans une cage désertée (9e). Sedan, par Tillon, prend l’avantage suite à un corner puis un cafouillage (26e). Le petit clan des supporters ardennais ne tremble déjà plus…

Sedan domine à outrance mais c’est Grenoble qui revient à sa hauteur, Passina décochant un tir splendide qui surprend Vincent (41e). Deux minutes après, Cuenca réalise un très bel exploit en médusant son arrière et fusillant Rouxel. Au repos, les Ardennais peuvent souffler…

Aussitôt la remise en jeu, Tillon effectue un beau retourné et son équipe semble définitivement à l’abri. C’est au tour de Cuenca, bien servi par Pascal, d’expédier le ballon au fonds des filets grenoblois (58e). Les Ardennais dominent nettement leurs adversaires sans s’employer outre mesure. Et l’avalanche continue… Voilà Cuenca qui remet ça (63e) alors que Piatek rend la note un instant moins salée (68e). Le festival est clos lorsque Célestin Oliver file à toute enjambée, effectue un centre impeccable au cordeau, la balle étant bien brossée, avec l’effet, Rouxel ne fait pas un geste et le ballon secoue les filets : 7 à 3 !

Pour la seconde fois de la saison, Dugauguez a pu aligner sa ligne d’attaque idéale et on a vu le résultat !

Au vestiaire, le président de la formation dauphinoise se remémore les noms des clubs qui, les saisons passées, ont exclu son équipe de la coupe de France soit Bordeaux (1952), Nancy (1953), Marseille (1954) et enfin Lille (1954). Et, d’ajouter « Sedanais, vous jouerez à Colombes le 27 mai prochain car, depuis quatre ans, les clubs qui ont éliminé Grenoble sont allés en finale !… »

En effet, Saint-Etienne (2-0) et Lyon (1-0) sont écartés si bien que l’UA Sedan-Torcy se retrouve en finale face aux Troyens de l’Ardennais Pierre Flamion. Et… Dudule va effectuer un tour d’honneur !


Claude LAMBERT

Note:


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